Genres littéraires et pédagogie

Pour continuer cette entrée en matière, et avant de nous atteler au travail pédagogique à proprement parler, changeons de registre en expliquant pourquoi le récit romancé de l'huître perlière ouvre ce blog à vocation pédagogique.

D'abord, parce qu'il me semble important de dire que l'idée de ce blog est née sur le terrain, dans mon quotidien de classe.

Et comme pour le détective, une enquête - on peut se dire que celle que l'enseignant a à résoudre chaque jour est de trouver comment transmettre un savoir de façon efficace - ne peut se passer d'une observation fine de terrain.

Même si la trame de nombreux polars se ressemblent, ils sont tous différents et ce qui fait en partie cette différence, ce sont les lieux et les personnages – ce qu’ils sont, ce qu’ils font. Je pense qu’il en est de même en ce qui concerne nos classes. Elles sont toutes un lieu de rencontre unique, chaque année renouvelé, entre des personnes – enfants / élèves, enseignants, adultes intervenant dans la classe (ATSEM, AVS…), directeur, collègues, RASED, maître Plus,  parents… Si on devait prévoir la distribution, comme dans les pièces de théâtre, pour une classe de 25 élèves, il y aurait une centaine de rôles à distribuer ! Alors forcément, il ne peut y avoir LA réponse unique. Les idées qui seront développées ici ne sont que des pistes que l’enseignant/détective considérera comme à suivre ou non, certaines pourront s’avérer pertinentes à un moment donné et fausses dans un autre contexte. 

N’attendez pas de ces pages un protocole à suivre, une méthode qui marche à tous les coups et déclinée en produits dérivées, et voyez dans ces quelques lignes la notice qui accompagne le médicament, qui prévient des effets indésirables et qui vous dit d’être vigilant à vous même.

D'où mon deuxième choix d'écriture. Chaque partie ne commencera pas par une citation de la partie des programmes traitée pour donner un aval de conformité. A l'heure de l'obsolescence programmée des programmes scolaires (j'en suis aux 5e depuis le début de ma carrière), je souhaite, dans ses pages, parler et réfléchir sur l'acte pédagogique. Refaisons encore une fois un parallèle avec la littérature policière, ce qui m’intéresse ce n’est pas la solution de l’énigme – la maîtrise de la compétence attendue par les élèves – mais sa résolution. D’ailleurs, notre capacité à nous distancer des programmes peut nous permettre d’entrevoir notre non-neutralité en tant qu’enseignant à travers le choix que chacun de nous fait en matière de pratiques. 

Connaissez vous un roman où l’un des principaux protagonistes est complètement neutre ? A partir du moment où il y a choix, on ne peut plus parler de neutralité et dans une classe, l’enseignant est celui qui a le plus de choix. 

Troisième choix d’écriture : ne pas s’enfermer dans un genre (ici le genre pédagogique) d’où des pages de nature variée. Il ne s’agit pas de s’imposer cette diversité comme Italo Calvino dans « Si une nuit d’hiver un voyageur » mais surtout de donner à voir que ce qui interfère sur ma pratique n’a pas toujours à voir avec le seul rayon pédagogie des librairies ou des sites ciblés École sur la toile. Peut être est-on alors plus près du récit de voyage ?