Il
n’y a pas qu’en
mathématiques qu’il doit y avoir des ordres de priorités et là
encore je suis intimement persuadée qu’une bonne part des
incompréhensions – y compris dans les relations humaines,
professionnelles et personnelles - est liée à la non formalisation
de
cet ordre des choses. L’objectif numéro un de ce projet n’est
pas de travailler de façon explicite la compréhension fine des
albums jeunesse utilisés. C’est l’objectif premier d’un autre
projet, d’autres
moments de la vie de la classe et beaucoup d’écrits nous
permettent déjà d’appréhender cette approche (on
peut évoquer les travaux de Maryse Bianco ou de Véronique Boiron).
On
peut bien sûr espérer des dommages collatéraux, mais ici, il
s’agit avant
tout d’utiliser
les albums pour se construire en tant qu’individus. Il s’agit à
travers la littérature et le personnage de l’enquêteur
d’apprendre à être, d’apprendre à faire, en
donnant à voir des stratégies de raisonnement pour pouvoir les
adopter.
On rejoint
l’utilisation psychologique des albums jeunesse proposait par
Joëlle Turin dans « Ces livres qui font grandir les enfants »
(Collection Passeurs d’histoires – Didier Jeunesse – 2012), les
travaux sur la cognition de Fayol, Cèbe ou Goigoux, ou
encore
Elzbieta
qui
écrit,
dans L'Enfance de l'art (Le Rouergue, 1997), que l'album donne aux
enfants " des outils qui permettent, un tout petit peu, de
penser l'impensable..."
Le
projet s’avère donc beaucoup plus large qu’un simple
réseau
littéraire. La littérature est ici avant
tout, un
moyen de donner à voir et
à penser,
d’exposer une démarche intellectuelle cruciale dans l’entrée
dans la lecture et dans bien d’autres apprentissages.
Il
y a des choses qui se passent mais qu’on ne voit pas. Le détective
illustre le fait qu’il se passe quelque chose dans la tête, permet
de laisser les élèves un peu moins seuls quand je leur dis :
« Personne ne peut apprendre à lire à ta place, ni maman, ni
papa, ni ton copain, ni
la maîtresse.
C’est toi, rien que toi. ». Si
l’on veut rendre l’élève pleinement acteur de ses
apprentissages, il faut, par nos pratiques pédagogiques, l’aider à
être cet apprenant et non un simple exécutant.
Notre
capacité à décloisonner les domaines des
programmes,
à avoir une vision non linéaire mais plutôt stellaire des
apprentissages est sans doute aussi l’un des enjeux de ce projet.
Les
savoirs qui permettent une entrée efficiente dans l’acte de lire
se construisent dans tous les domaines , sciences, art,
activités sportives, activités créatives...La lecture n’est pas
qu’une question de livre ! L’utilisation de l’image de
l’enquêteur,
utilisable
dans de nombreuses situations de classe, peut
permettre de donner à voir aux élèves la cohérence de ce qui leur
est proposé à l’école et donc d’y donner plus facilement du
sens et d’être prêt à fournir les efforts nécessaires pour
franchir le pas de l’entrée dans la lecture– on peut l’espérer
tout du moins !
Pour
revenir à cette idée d’une pensée stellaire, là encore la
visualisation d’un tableau d’enquête où l’enquêteur affiche
toutes les informations recueillies, de natures
variées,
les bouts de ficelle qui lient les différents éléments peuvent
devenir
l’image mentale de
l’acte de construire sa pensée.
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