les enquêtes de Bout de ficelle: 1,2,3...12

"La mémoire est un don précieux.

Quand on le possède, le passé n'existe pas."

Agatha CHRISTIE - Cartes sur table - 1936

Si tous les détectives de papier ont un point commun, c'est bien celui-là: la mémoire. On pourrait même parler de mémoire de travail à l'échelle d'une enquête. Dans le livre qui a donné la citation d'introduction, les quatre détectives qui doivent résoudre le meurtre - en particulier Hercule Poirot et Ariadne Oliver - font appel à leur mémoire. Et celles de ces deux personnages fonctionnent bien différemment mais se révèlent tout aussi efficaces.

Pour commencer ce module sur "Apprendre à mémoriser", en jouant la carte de la diversité, commençons à décliner, ce que l'on peut proposer autour de la compétence suivante: réciter la comptine numérique jusqu'à 12.

Dans un premier temps, soyons clair sur l'objectif:

il s'agit d'une compétence à proprement parler, d'un apprentissage spécifique.
il ne s'agit pas d'un travail sur la construction du nombre.
les deux compétences cognitives principalement mobilisées y sont le langage et la mémorisation
la connaissance de la comptine numérique va plus loin que là où on l'utilise dans chaque niveaux d'apprentissage (PS: jusqu'à 5/6; MS: jusqu'à 10/12; GS:au minimum jusqu'à 30).
l'objectif final de GS (au moins jusqu'à 30) se construit par des modules complets progressifs (de 1 à 10 en période 1; de 1 à 12 en période 2; de 1 à 15 en période 3; de 1 à 20 en période 4 et de 1 à 30 en période 5).

Ce que l'on peut lire dans les travaux de chercheurs:

il s'agit de la connaître avant de savoir l'utiliser. Cette question est un sujet polémique en particulier entre Brissiaud et Ermel. Pour le premier, la connaissance de la chaîne numérique ne sert pas à grand chose. Il faut apprendre les décompositions de nombres. Ermel parle lui d'un entraînement à la chaîne numérique. Si l'objectif est une compétence langagière ("réciter"), la travailler pour qu'elle devienne un outil au service des mathématiques est une obligation.
Fusson (1988) a décrit trois phases dans l'acquisition de la chaîne numérique: la phase "chapelet", la chaîne insécable et la chaîne sécable avec pour chacune de nouvelles compétences. Elles peuvent nous servir de petits cailloux pour jalonner l'apprentissage et très prosaïquement de critères d'évaluation.
Presseau & Frenay (2004) invitent à prévoir des confrontations variées pour qu'elle (la chaîne numérique) devienne un savoir mobilisable dans d'autres situations. Il s'agit là aussi de construire un rapport conscient entre cette récitation (langage) et les quantités (lien entre code oral et quantité)

En ce qui concerne la mémorisation:

travailler la mémoire verbale par la fréquence de la répétition, en particulier en jouant sur le registre ludique ou avec des moments d'auto-répétition de la chaîne numérique.On entend par fréquence plusieurs fois par jour.
passer du temps sur la même comptine pour consolider les apprentissages des élèves les plus fragiles.
faire travailler la mémoire en l'associant au sens visuel, auditif ou tactile ou bien à la motricité pour accéder à la mémoire à court terme. Il s'agit de sortir de la seule utilisation des compétences cognitives langage et mémoire en faisant appel aux compétences sensibles et motrices.

En ce qui concerne la motivation:

j'ai décidé de ne pas donner l'objectif d'apprentissage en montrant les usages avant de commencer à structurer celui-ci. L'idée est de voir si les élèves - en particulier les plus en difficulté - mobilisent cette connaissance dans une situation "fortuite". Je vais encore une fois truander mes élèves...

Plan d'actions:

Automatiser la connaissance niveau "chapelet" (version récitée)

Dans le module "Je m'équilibre" en sport, tenir la position en comptant jusqu'à 10, 12,15,20. Sur une séance, cela équivaut à une vingtaine de fois la récitation de la comptine. Sur un module de 8 séances... J'utilise un ouvrage ancien "Même pas droit à la gym" mais les cartes yoga équilibre peuvent servir de support de travail.
Jeu du "mot de passe": celui-ci permet d'évaluer la production de beaucoup de chose, la prononciation, la mémorisation. Il s'agit pour les élèves de produire la compétence attendue (ici réciter la comptine numérique) pour franchir une porte par exemple. Pour les élèves les plus en difficulté, les garder à côté de soi pour qu'ils profitent du modèle produit par les autres élèves. On peut aussi les faire passer par deux en associant un élève qui maîtrise la compétence et un autre pour qui c'est plus fragile.

Voir si la mémorisation de l'ordre est correct:

Jeu des erreurs: la maîtresse récite la comptine en faisant des erreurs de plus en plus fines. Les élèves doivent la corriger. Toujours redire la comptine correcte après une correction.

Montrer la stabilité de l'ordre à partir de comptines:

1,2,3 nous irons au bois
Pimpanicaille
1,2,v'là les oeufs
...
La question posée aux élèves est la suivante: "est-ce que l'on dit toujours les nombres dans le même ordre quand on récite les comptines?"
Faire comparer les comptines pour montrer que dans toutes les comptines l'ordre est toujours le même quelque soit les fractures dans la chaîne.
Faire le même constat avec la comptine numérique en anglais

Favoriser la mémorisation par l'utilisation d'une ligne mélodique

Apprendre des chansons comme

1,2,3,nous irons au bois
Pimpanicaille

Travailler le fait que la chaîne soit sécable:

Réciter la comptine en alternant un chiffre dit fort, un chiffre dit silencieusement.
Frapper dans les mains ou taper du pied entre chaque nombre.
Jeu du tunnel: en continuant à taper pour garder le rythme de la comptine, dire les chiffres dans sa tête. Prévenir les élèves que le tunnel commence à et se termine à. Le tunnel peut commencer à 1.
A 2, dire la comptine en alternance 1/1, 2/2, 3/3

Élargir à l'usage culturel du chiffre 12: boîtes à oeufs, douzaine d'huîtres ou d'escargots, mois de l'année, heures.

Créer un affichage de classe pour mémoire et la boîte du 12 où sont rangés des objets variés (calendrier, montre, boîte à oeufs, plats à escargot...).

Consolider la mémorisation et travailler la correspondance terme à terme:

à partir de jeux de manipulation avec des boîtes d'oeufs et des plats à escargots.

Placer en disant la comptine les objets dans les alvéoles.
Proposer des objets de tailles différentes (marrons, escargots, haricots, grains de café, lentilles...). il s'agit de montrer que la quantité est indépendante de la taille.
Jeu de commission: aller chercher le nombre d'objets nécessaire de l'autre côté de la classe. Introduire des boîtes à oeufs "1O" ou des assiettes "9" pour obliger à dénombrer.

en sport, créer un parcours autour d'un nombre: ex: 12 cerceaux, 12 haies, 12 galets... les élèves sont par groupe de 4 hétérogène. 2 comptent et 2 font le parcours à la vitesse donnée (un nombre = un obstacle) puis on échange. Cela peut être l'occasion d'introduire le fait de compter en "marche avant" et en "marche arrière". C'est la maîtresse qui récite la comptine. On peut travailler sur de très petites quantités au départ (de 1 à 3 puis de 1 à 5) pour poser le principe.

Critères d'évaluation: