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lundi 25 novembre 2019

J'ai fait un rêve...


Le rêve, un ressort pédagogique?
Pour débuter, on peut se rendre compte qu’il se passe quelque chose dans sa tête en utilisant le thème du rêve à travers un réseau littéraire
Le point de départ de ce travail est l’album d’Anthony Browne, Marcel le rêveur. L’objectif principal proposé ici n’est pas de travailler sur les ambiguïtés du récit, ou sur une structure narrative particulière aux récits de rêve, le récit dans le récit.1

Ici, pas de doute, c’est écrit, Marcel rêve. Après une (ou deux) lecture(s) découverte de l’album, avant d’aborder le moindre travail d’analyse, on doit passer par une phase obligatoire : laisser les élèves s’exprimer sur leur propre vécu, leur propre ressenti, leurs propres rêves. Deux intérêts se dégagent alors. D’une part, on pourra gentiment leur rappeler qu’ils nous l’ont déjà raconté si l’élève n’arrive pas à se décentrer dans la suite du parcours. D’autre part, on aura des exemples propres au vécu des élèves de la classe pour faire le parallèle avec les apprentissages formels qui suivront.

A la découverte d’un camarade de classe un peu particulier : Marcel


Marcel est un personnage récurrent extrêmement intéressant à utiliser en GS. Il permet de poser la pérennité d’un personnage, de définir les constantes qui permettent de l’identifier. Dans l’univers d’Anthony Browne, il y a Marcel mais il y a aussi moult autres singes qui ne sont pas Marcel. Comment reconnaître Marcel parmi les autres personnages de l’univers de cet auteur ? En réalisant des tris en utilisant des photocopies des illustrations. Les albums ne doivent pas avoir été lus au préalable. Pour commencer, faisons simple avec des indices clairement identifiables, en particulier la tenue de Marcel. Dans un deuxième temps, complexifions les choses avec des images tirées de Marcel le magicien, Les tableaux de Marcel ou Les histoires de Marcel par exemple. Les élèves seront alors dans l’obligation d’aller plus loin dans l’analyse des indices dans leur lecture d’images.
On peut dès lors commencer à introduire la notion d’indice et essayer de la définir simplement comme un signe qui indique quelque chose.
Pour renforcer le tout, on peut proposer deux ateliers marque-pages1 : l’un, à partir des images qui ont servi au tri ; l’autre, avec les bananes cachées dans les illustrations de Marcel le rêveur. Il s’agit là d’un véritable travail de détective car il y en a plusieurs centaines disséminées au fil des pages.


Mais que se passe-t-il dans la tête quand on rêve ?

Premier élément clef : notons d’abord qu’il se passe quelque chose – sinon il n’y aurait pas d’histoire – même si à aucun moment Marcel ne quitte son fauteuil. Tout se déroule dans l’imaginaire, dans la tête du personnage. Pour élargir les représentations des élèves sur l’existence de l’activité mentale, on peut consolider notre argumentation avec les illustrations de Je mangerais bien une souris! de Claude Boujon où l’on voit clairement le chat qui ne bouge pas sur les différentes illustrations et sa pensée sous forme de bulle. C’est le moment d’introduire le symbole de la bulle qui nous servira régulièrement comme « panier d’indices » dans les résolutions d’énigmes.

Deuxième élément clef à dégager : le rêve – et de manière générale tout ce qui se passe dans la tête - se nourrit de culture, d’expériences, de rencontres. Tout cela n’est pas possible sans la mémoire.
Mettre en avant l’importance des références culturelles avec Marcel le rêveur est un jeu d’enfant. Proposer un panier contenant les œuvres de référence et demander aux élèves de les associer aux illustrations de l’album puis dans un deuxième temps, jouer au jeu des différences et des analogies, image par image. On leur demandera bien sûr d’argumenter à chaque fois leur choix en les amenant à des descriptions de plus en plus précises. Outre un affichage-mémoire permettant de se souvenir d’une ou deux mises en réseau – sur les vedettes de cinéma ou la scène de l’atelier du peintre par exemple– toutes les images rencontrées doivent restées facilement accessibles aux élèves tout au long de l’année mais en vrac… un peu comme une vieille valise pleine de photos. Il est important de faire disparaître le tri de manière à offrir aux élèves la possibilité de réutiliser ces images dans un autre contexte et dans un autre réseau.

Troisième élément clef à construire : la tête se nourrit de connaissances autre que visuelles. C’est l’album Je mangerais bien une souris qui nous apporte ici matière à illustration. Le chat sait de quoi se compose une souris : « un museau pointu, deux petites oreilles, un corps rondelet, quatre pattes, une longue queue et des moustaches. » Il nous dit même comment il le sait : il a cherché dans sa tête tout ce qu’on lui a dit sur les souris, il se souvient. Notre chat ne se livre-t-il pas sous nos yeux à la première activité intellectuelle que l’on attend des élèves ? Ne met-il pas en image accessible à nos élèves ce que l’on attend d’eux à longueur de temps ?1

Quatrième élément clef à rappeler : il faut parfois multiplier les essais avant d’arriver à un résultat. Là encore, utilisons Je mangerais bien une souris ! Le chat multiplie les essais sans que cela ne lui pose de difficulté de recommencer tant que le résultat ne lui convient pas. C’est normal ! Bon d’accord, avant de commencer on voit bien à sa tête qu’il n’a pas forcément envie de se mettre au travail mais à la fin, il a un grand sourire de réussite. La construction de cette posture d’élève est un véritable patchwork de petits détails. La prise de conscience des sentiments des différents personnages – avec le sourire du chat ou celui de Marcel – doit être mise en avant de manière quasi systématique pour permettre aux élèves une identification possible aux personnages. Dans la plupart des cas, il y a une fin heureuse et donc désirable.

Cinquième élément clef à donner : notre imaginaire est un lieu ouvert où les contraintes du réel sont moins pesantes. Marcel peut voler ou Max peut partir dans un pays où les Maximonstres existent. Je vous accorde que l’on entre ici dans un domaine sensible et difficile à appréhender sous l’angle pédagogique. Car l’école est le lieu où l’imagination n’est pas toujours la bienvenue – dans l’orthographe des mots par exemple – mais où elle est aussi nécessaire – dans la capacité à écrire un court récit par exemple. Enrichissons leur imaginaire, apprenons leur à le mobiliser et à le transformer en réalité de façon ponctuelle mais pour se faire, accompagnons les, ne les dirigeons pas vers une destination pré-programmée. Cet équilibre est un travail de funambule pédagogique et peut amener l’enseignant sur des chemins inconnus à lui aussi car il existe de bien nombreux sentiers.

Avec Le rêve d'Albert de Léo Lionni, on consolide encore l’importance du capital culturel à travers la visite au musée mais surtout on peut évoquer ce qui se passe dans la tête quand on essaye de transformer le rêve en réalité. Ce que l’on a rêvé permet de voir le monde qui nous entoure différemment et de le modifier.

Et si on essayait de faire pareil ? Il s’agit de proposer des ateliers dans différents domaines d’activité où l’on va conduire les élèves de l’acquisition et de la capitalisation d’un patrimoine culturel à la phase de création, en passant bien sur par la phase d’intellectualisation. Cette dernière devra être formalisée à travers l’usage de notre « bulle-panier » dans ses différentes étapes. Dans la droite ligne de l’album de Léo Lionni, le domaine des arts visuels se prête fort bien au jeu mais je n’entrerai pas ici dans les détails des activités « à la manière de ». Il existe de très nombreuses publications et sites internet qui offrent des propositions où l’on peut mettre en parallèle la démarche des « paniers-bulles »2et le monde créatif d’un artiste clairement identifié.



1C’est ce qui est proposé dans Parcours Lecture aux éditions Accès. Il peut d’ailleurs être plus que judicieux de mener de front les deux propositions pédagogiques.


1Le principe des ateliers marque-pages est simple. L’élève doit replacer des photocopies d’illustrations, de détails, de texte à la bonne page du livre.   

1Dans une programmation croisée, c’est aussi le bon moment pour travailler sur le nom des formes géométriques.

2J’utilise par exemple les propositions de Patrick Straub dans Hors d’oeuvre d’art chez Acces .












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